30 octobre 2011

Y



NO COMMENT


Photo réalisée le 30 octobre 2011



-Pourquoi le soleil est-il rouge le soir, papa? demanda un jour le jeune garçon à son père.

-Pour la même raison que la lune est parfois énorme! C'est le cadeau que fait un garçon comme toi à son amoureuse: quand il l'aime comme un fou, il est capable de rapprocher la lune pour que leur dîner romantique soit encore plus magnifique. Et parfois, le garçon préfère offrir le plus beau coucher de soleil à sa bien-aimée, parce qu'elle vaut tout à ses yeux, et qu'il ne reculerait devant rien pour que la soirée qu'il passe avec elle soit réussie. Ainsi, avec une lune très grande, ou un soleil rougeoyant, qui les caresse avec une infinie douceur, les deux amoureux peuvent laisser aller leur imagination, et parler de leur avenir, et peut-être que le garçon la demandera alors en mariage...


Les deux complices continuèrent ainsi à discuter des choses des grands pendant un certain temps, assis sur ce banc, sur lequel ils aimaient s'arrêter lors de leurs promenades, le soir, quand il rentrait du travail, pour admirer la beauté du lac. Voilà maintenant 8 ans que le petit était arrivé dans la vie des deux parents. Tant de joies mais aussi d'inquiétudes, ce petit bout de chou leur avait apporté un souffle nouveau. Et aujourd'hui, il se mettait à philosopher avec ses "pourquoi"... C'est drôle, un mot aussi simple, d'une construction étymologique très terre à terre, "pour quoi fait-on cela, pour quel motif, quelle raison?" Un mot si pur qu'il se résume en anglais à une seule lettre, l'avant-dernière de l'alphabet, comme si le dernier mot était resté en suspens, caché dans une réponse qui ne viendra peut-être jamais... Un mot pur, utilisé par les enfants avides de vérité, d'authenticité.


Puis un jour on devient un grand, on nous a répété sans cesse de ne pas trop se poser de questions, et les "pourquoi" deviennent soudain des "parce que", des "c'est ainsi, inutile de réfléchir plus loin". On se croit mûrs, on pense tout connaître et c'est là que nous commençons à perdre l'innocence du "pourquoi", sûrs de nous, et nous commettons les premières erreurs, celles qui comptent vraiment.


-Qu'est-ce que tu lui as offert, toi, à maman?


Sorti brusquement de ses pensées, le père répondit:


-Je lui avais fait une promesse, une promesse très importante. C'était quelque chose qu'elle attendait depuis très longtemps.

-Elle a dû être contente, alors! Et tu as tenu cette promesse?


C'était peut-être la promesse à laquelle il avait attaché le plus d'importance de toute sa vie. Il n'avait peut-être pas toujours été à la hauteur, peut-être l'avait-il parfois déçue, ou blessée. Mais pour ce cadeau-là, il était prêt, il ne voulait pas en rater le moindre détail; il savait que ce serait la réussite de leur vie à tous les deux. Tout le reste n'avait aucune importance à ses yeux et ses oreilles qu'il bouchait, il ne voulait pas risquer la moindre parole qui pût compromettre leur rêve.


Aujourd'hui, le jeune garçon avait grandi, c'est du haut de ses 24 ans qu'il demande à son père, assis à côté de lui sur le banc de son enfance:


-Pourquoi tu ne m'as jamais répondu ce jour-là?
-Ta mère voulait absolument un garçon en jeans bleu et baskets blanches pour partir à l'école.

-Je suis passé par cette étape-là, je me rappelle des photos! Tu as donc bien tenu ta promesse, non?! Pourquoi est-ce que tu hésitais?

-Je crois que ta mère voulait une famille...

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