30 novembre 2012

Petit bout de Canada




Ma cabane au Canada

Photo réalisée le 8 août 2010



Bon, d'accord, celle-ci se trouve dans le canton de Lucerne. Mais tout de même, elle me fait un peu rêver, cette cabane. Depuis très longtemps, cette envie de tout quitter pour aller vivre en ermite au fin fond du Canada me tenaille les entrailles. Pourquoi? Pour vivre un rêve de gamin, un rêve qui se construisait en même temps que mes cabanes en forêt, un endroit où je pouvais passer des journées entières. Un endroit où j'étais seul, où je me sentais libre et heureux de pouvoir fabriquer tout ce que je voulais, tout ce dont j'avais besoin, à partir de quelques branches, pierres et un peu de ficelle. Pour me prouver que vivre en totale dépendance de la nature était possible, j'ai même fait une semaine de vie en pleine forêt, lorsque j'avais 15 ou 16 ans.

Depuis ce jour, rien n'était plus impossible, et aller vivre au pays des lacs et des sapins devenait une réalité qui n'avait plus rien d'abstrait: dans mon esprit, cela n'était plus qu'une question de temps. Et puis le temps a passé, les études, ma formation, tout s'est très vite enchaîné, et la réalité qui était devenue pour ainsi dire palpable s'éloignait à nouveau. Mais un rêve ne s'efface pas si aisément, heureusement, d'ailleurs. S'il ne s'efface pas, il peut en revanche se transformer à volonté.

La volonté, du moins la mienne propre, n'est pas l'acteur principal de la transformation, mot un peu fort, je dirais plutôt "évolution" de ce rêve-ci. Aujourd'hui, mon rêve d'exil, d'érémitisme se rapporte moins à un défi envers moi-même et ma capacité à subsister par mes propres moyens, mais s'apparente plutôt à un rapprochement entre l'homme et la nature, entreprise pour laquelle il est indispensable que l'homme s'éloigne  de l'homme. La civilisation moderne, telle qu'on la connaît en Occident, a goudronné la nature, pensant ainsi la dompter. Cette société dont nous faisons partie a érigé un mur entre l'homme et la nature, plaçant l'homme tellement au-dessus de la Terre qu'il songe maintenant à coloniser les autres planètes. Et pourtant, au fond de nous, nous savons tous que cette Terre, nous lui devons tout, et que nous sommes en train, à force de fermer les yeux sur tant de choses, de nous en séparer. Nous savons que nous en faisons partie, que nous avons besoin de cette nature, pas seulement pour aller se promener le dimanche, mais tous les jours! Nous le savons, mais combien d'entre nous font quelque chose?

Alors, à ma façon, aller vivre seul dans une cabane isolée de la civilisation, et non du monde, c'est aussi une manière de m'opposer à ce mouvement d'autodestruction, une manière de me retirer d'un engrenage si gigantesque que tout nous échappe. La solitude permet de vivre de manière authentique et juste envers une nature dont nous faisons partie intégrante. Je cherchais des synonymes du mot ermite, et parmi les propositions apparaît le mot "sauvage". J'aime ce mot qui, aujourd'hui, est plutôt attribué au monde animal. J'aime l'idée que l'on puisse associer un homme au monde animal par un simple concept d'éloignement de la société. La définition même du mot ermite est donc un rapprochement de la vie sauvage, par un éloignement de la civilisation, jusqu'à devenir soi-même sauvage. Que signifie alors sauvage? Est-ce une perte de l'identité humaine, que de se rapprocher de la nature?

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