24 octobre 2008

Vivre soi.


"Vivre" seul.

Photo faite le 12 octobre 08, près de Domdidier


C'est le but passager de quelques-uns d'entre nous, pour d'autres c'est un véritable choix de vie. Et pour beaucoup, c'est simplement un moment agréable, que l'on ne recherche pas forcément, mais qui nous fait tout de même du bien quand nous le vivons. Je parle de ces petits moments que l'on passe avec soi-même, et avec pour seul compagnon son esprit, avec qui nous dialoguons en silence. Il y en a qui n'aiment pas ces moments-là, pour d'autres ce sont de véritables moments privilégiés.

Vivre seul pose problème, parce que pour beaucoup, cela signifie vivre sans l'Autre. Par l'Autre, j'entends toutes les personnes qui nous entourent, qui nous apportent d'une manière ou d'une autre un bien-être plus ou moins profond. Vivre des moments seul, c'est pour certains aussi vivre en solitaire. Pour d'autres personnes encore, c'est se sentir abandonné, comme si le monde qui nous accompagnait il y a encore peu nous laissait à nu, au milieu de nulle part. Certains angoissent en entendant ces mots car ils s'imaginent une vie de célibataire, vie qui serait alors dénuée de sens et de but...

Si vivre seul peut angoisser certains, pour d'autres c'est une véritable aide. Car celui qui sait vivre seul, celui qui n'éprouve pas le besoin de sentir la présence de quelqu'un à ses côtés pour être rassuré, approche de la liberté. Car il apprendra au fil du temps et des expériences à puiser dans ses propres ressources, il saura ce qui lui apporte le bien-être, il saura s'écouter, simplement. Et cela ne signifie pas être coupé du monde extérieur, cela signifie plutôt aller y puiser et y apporter juste ce que l'on peut, ni plus, ni moins. C'est en acquérant ce détachement dont tant de philosophes asiatiques parlent, que l'on peut accéder à son soi réel et profond. Cette connaissance de soi est libératrice, elle permet de vivre en harmonie avec soi-même et le monde qui nous entoure.

Et puis cet accord avec soi-même, ce refus du mensonge, permet de vivre des rencontres authentiques, libérées de toute hypocrisie. C'est ce qui me semble un des pires fléaux, cette hypocrisie. On a souvent dit: "souris, on te le rendra". Je pense que cette phrase peut métaphoriser la sincérité: il suffirait d'être franc, vrai, et la personne nous répondra avec le même état d'esprit. Alors vous trouverez certainement tout ceci très naïf. Eh bien je vous répondrai que je n'en ai rien à faire.

La naïveté permet à mon avis d'apprécier les choses, les gens et les événements comme j'ai envie de les vivre. Epictète disait: "ce qui trouble les Hommes, ce ne sont pas les choses, ce sont les jugements qu'ils portent sur les choses". Si mon jugement est libre de tout préjugé, ou même d'idées négatives à l'encontre de mon interlocuteur, je ne pourrai que le considérer positivement. Cela semble naturel pour certains, ils n'y réfléchissent même pas. Pour d'autres, c'est un effort conscient. Mais le résultat est toujours le même: en respectant et en cherchant toutes les qualités de la personne avec qui je converse, j'en trouverai immanquablement. Et cette personne me respectera à son tour, et on pourra entrer dans une nouvelle et agréable relation de confiance réciproque. Et puis, en principe, lorsqu'un vrai sourire est adressé, on y trouve toujours une réponse...

Si vivre seul permettait tout ceci, si vivre avec l'esprit libéré du jugement d'autrui, en sachant ce que nous sommes, si vivre ainsi libéré des contraintes quotidiennes permettait d'être mieux, pourquoi sommes-nous si nombreux à continuer à nous demander ce qui ne va pas? Des amis, des proches, peut-être soi-même, nous connaissons probablement tous cette question un jour ou l'autre: quel est le but de ma vie? Et quelques-uns dépriment en ne trouvant aucune réponse.

Alors je me demande si il ne serait pas plus simple et plus sain de se dire que l'on n'a pas besoin d'un sens, on n'a pas besoin de comprendre sa vie, pour être bien avec soi-même. On n'a pas besoin de savoir ce que les autres vont penser de telle ou telle action. C'est sans aucun doute parfaitement inutile et subjectif. On n'a pas besoin de savoir l'Autre tout près, de savoir qu'il pense à nous. C'est peut-être un petit plus, qui amène un rayon de soleil. Mais ce n'est pas cet Autre, le soleil. Pour savoir où trouver ce soleil, il suffit d'ouvrir son regard, d'être attentif à l'Autre en ayant pleine conscience de soi. C'est à travers ce regard inconditionnellement aimant que la lumière émergera.