26 juillet 2008

Lâcher prise


Un symbole de notre intérieur...

Photo du 11 mai 08, St-Aubin


Cette photo du mois a été prise un jour de grande mélancolie. On aurait presque pu l'appeler une photo du "moi", ce jour-là. Elle est sombre, comme éteinte. Juste un petit détail, brillant, un coeur accroché à son cuir noir. Ce coeur a été le symbole de beaucoup de choses. Il était un peu ce à quoi je me raccrochais lorsque tout était noir autour de moi, c'était un symbole de paix, de sûreté...

Mais quelle sûreté? Un simple bout de métal a-t-il autant de "pouvoirs" que cela?! Et cette sécurité, ce calme, cette sérénité, ne sont-elles pas pures illusions? Dans une vie, on peut le dire, passablement chaotique, comment ce simple objet peut-il nous rassurer? On accorde parfois énormément d'importance à toute une quantité d'objets. Certains les appellent "objets sacrés", d'autres les voient comme de simples "grigris", d'autres encore les considèrent comme des objets à ne pas oublier, ni perdre, ni abîmer, mais sans trop savoir pourquoi. Mais de quelque manière que nous appréhendions ces objets, ils ont une importance particulière à nos yeux.

Je me demande alors: cette importance, cette tendance à nous accrocher à ces objets sentimentaux, ne vient-elle pas simplement du plus profond de notre être? Une personne a dit un jour à une amie: "tu as tout le courage qu'il te faut en toi, il te suffit de l'accepter". En s'accrochant à certains objets, ne cherche-t-on pas simplement ailleurs ce qui est en nous? Ou alors est-ce qu'on cherche à "matérialiser", à se représenter à l'aide de quelque chose de concret, ce que l'on ressent profondément?

Nous avons tendance à nous attacher à certains objets, à certaines musiques qui nous rappellent de multiples souvenirs, à certains goûts, à certaines odeurs, ... Cet attachement nous aide à progresser, car il nous permet de visualiser, de mettre un nom sur ce que nous ressentons. Il nous aide aussi à faire le deuil de certaines choses, certains événements. De plus, le fait d'assembler une émotion, un sentiment, avec un symbole, nous permet de le revivre simplement en touchant, sentant, écoutant, ou en voyant ce symbole souvent bien choisi. Cette réminiscence de beaux souvenirs, ou de mauvais, nous permet de nous protéger au quotidien; il nous permet de passer outre le coup de cafard, ou de ne pas refaire les mêmes erreurs. La symbolisation d'événements marquants à l'aide d'objets est un moyen que nous, humains, avons trouvé pour grandir toujours un peu plus, avancer sur le chemin de notre vie; un chemin jalonné par ces symboles, qui nous permettent de ne pas nous tromper de route, ou de retourner un petit bout en arrière, voir comment on avait fait dans telle ou telle situation.

Mais parfois, il y a un danger à cet attachement: il arrive que l'on attribue un bonheur, un bien-être, à une personne. Le danger, avec les personnes, est leur impermanence. Un objet, si on en prend un minimum garde, ne partira jamais, une musique ne changera pas au cours du temps, une odeur ne sera jamais crée par une autre source que celle qui a toujours produit cette odeur. Bon, les humains ont souvent voulu tout synthétiser, parfois avec succès... Mais les personnes... Les individus sont tous individuels. Il ne faut pas l'oublier: chaque personne a son caractère, son histoire, chaque personne évolue indépendemment de nous. On ne peut et ne doit jamais considérer une personne comme un objet, entre autres à cause de cela. Ne pas considérer l'indisponibilité d'une personne, ou la fin de son amour, ou simplement son indépendance, reviendrait à l'emprisonner auprès de soi, comme une peluche, mais vivante.

Il est bon de se mettre des jalons, des repères. On en a besoin. Et notre entourage peut très bien nous en fournir. Sans ces jalons, nous sommes perdus, nous errons dans le champ ouvert aux erreurs. Nous croyons être complètement disponibles, libres, capables d'aller n'importe où. Et c'est probablement vrai. Mais n'importe où, cela comprend énormément de chemins, et pas forcément les meilleurs, ni les plus simples, ni même les plus sûrs. Il devient alors extrêmement difficile de ne pas se perdre.

Nous avons donc besoin, afin de mieux nous construire, de quelques repères. Nous savons en principe, assez naturellement, les choisir pour un dessein des plus adéquats. Parfois même, ils s'imposent à nous, ils deviennent si évidents que nous ne pouvons refuser de les accepter. Notre entourage nous en propose souvent de très judicieux. Mais notre seul "devoir", si l'on veut vivre dans le respect et l'harmonie, est de ne pas confondre repère, et source de repères.